L'interprofession des semences et plants
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Le développement des semences bio pour l'agriculture

Pauline Girolami est animatrice de la nouvelle commission transversale « Semences & plants biologiques » chez SEMAE. Selon elle, les 60 ans de l’interprofession sont un gage d’optimisme pour la filière semences bio. Cette dernière peut s’appuyer sur les compétences d’une structure ayant accompagné le mouvement dès ses débuts, et encourageant les échanges entre tous les acteurs pour se développer. Elle revient avec nous sur les évolutions du bio au sein de l’interprofession.

Pauline Girolami, animatrice de la commission transversale bio de l’interprofession – © SEMAE / Thibaut Del Pino

Dans quel contexte s’est fait le développement des semences bio ?

Le développement des semences bio est l’une des conséquences logiques des fortes attentes de la société civile au début des années quatre-vingt-dix. Il s’est fait en parallèle des réglementations avec notamment l’adoption d’un règlement européen AB au niveau végétal en 1991. Nous avons la trace des premières réunions sur les semences bio avec le GNIS dès 1997. C’est un peu trivial de dire cela, mais tout commence avec une semence et le bio n’y fait pas exception ! Le sujet a donc été posé de suite comme une thématique nécessaire à traiter en termes d’organisation de la filière. On a défini ce qu’était une semence ou un plant « biologique », ainsi que les conditions de production et les normes de qualité qui devaient s’y appliquer.


Comment les semences bio
ont-elles intégré
l’organisation SEMAE ?

Au début, le sujet était traité à travers des réunions très générales avec l’INAO (Institut national de l’origine et de la qualité) (axées surtout sur la réglementation), dans le cadre de la mise en place des productions de semences et plants biologiques. Des actions plutôt « individuelles » étaient menées selon les sections les plus avancées dans le développement du bio. Ainsi, les sections des Céréales à paille, des Plants de pommes de terre, du Maïs et des Plantes oléagineuses ont commencé à s’organiser collectivement en commissions « bio » spécifiques à leurs groupes d’espèces. Celles-ci se réunissent annuellement, afin de faire les bilans de campagne, suivre l’évolution du marché et d’étudier les disponibilités en semences bio en fonction de la demande.

L’écriture du Plan de filière en 2017 a amené l’interprofession à adopter une approche plus transversale pour traiter des problématiques en bio, communes aux différentes espèces et pour organiser des actions collectives. C’est ainsi que la Commission transversale « Semences & plants biologiques » de la ‘1ère génération’ a été créée.


Comment s’intègre le bio
dans la structuration
de l’interprofession ?

La commission transversale se nourrit des discussions des commissions bio des sections concernées et les traite de manière intégrative à l’échelle de la filière. Lors de sa mise en place en 2017, elle était présidée par Pierre Pagès, déjà vice-président du GNIS à l’époque. Le changement de gouvernance avec la transformation du GNIS en SEMAE en 2021 a donné lieu à la création de quatre autres commissions transversales, et par cohérence, au renouvellement de la composition ainsi que la présidence de celle relative au bio. Aujourd’hui, elle revient à Thomas Bourgeois, le vice-président de la section « Céréales à paille et Protéagineux », membre du bureau de SEMAE, président de la FNAMS (Fédération nationale des agriculteurs multiplicateurs de semences), et lui-même agriculteur engagé dans le bio.

Au-delà des membres élus de la commission transversale bio, le conseil d’administration de SEMAE est très impliqué dans la filière « bio ». L’AB s’intègre à part entière dans la vie de l’interprofession, comme tout autre modèle agricole permettant de produire des semences et des plants. Le bio est d’ailleurs l’un des axes prioritaires du Plan de filière, qui se déploie dans le cadre du Projet stratégique de SEMAE.

Quels sont les services rendus par l’interprofession
à la filière semences bio ?

Les services fournis par l’interprofession sont multiples, en lien avec le fort développement de l’activité « semences bio » en réponse au développement de la consommation en AB. Tout d’abord, l’interprofession a permis de structurer et d’organiser la filière « semences bio », incarnant le lieu d’échanges et de réflexions pour tous les maillons de la filière semences bio.

L’enjeu principal étant de fournir une offre en semences & plants bio pour tous les producteurs français, l’interprofession est en charge (par délégation de l’INAO) de la gestion du site www.semences-biologiques.org depuis son lancement en 2004. Il s’agit d’une base de données informant les professionnels des disponibilités variétales en semences et plants bio et permettant de déposer une demande de dérogation si la variété demandée n’est pas disponible en bio.

SEMAE assure ainsi un suivi statistique de la production et de l’approvisionnement en semences et plants bio. Dans l’objectif de valoriser cette filière, SEMAE met en œuvre un plan de communication qui se décline en fonction des cibles et des supports. Enfin, l’interprofession s’implique dans les programmes de recherche, en finançant des actions de production autour de techniques alternatives à l’usage de produits phytosanitaires, qui seraient applicables au bio.

Semences de blé dur biologiques – © SEMAE / Studio 77

Site www.semences-biologiques.org

Quels sont les freins et les difficultés que rencontre la filière ?

Il y en a deux principaux :

  • D’abord, la technicité de la production de semences bio qui peut être compliquée pour certaines espèces. Pour prendre l’exemple du colza bio, les techniques alternatives de lutte contre les insectes ravageurs accessibles aujourd’hui ne sont pas assez efficaces pour permettre de produire correctement des semences en AB. Par conséquent, la production française de semences de colza bio reste très marginale, de l’ordre d’une dizaine d’hectares ;
  • Ensuite, la difficulté liée au recrutement d’agriculteurs possédant la double compétence, à la fois sur la multiplication (la production de semences/plants) et sur la production en AB. C’est un réel enjeu pour la pérennité de la filière ! L’une des missions de SEMAE est ainsi d’aller chercher les agriculteurs multiplicateurs, les accompagner et leur donner envie de s’impliquer dans le développement de la filière semences bio.

1.420 agriculteurs-multiplicateurs sont impliqués dans la production de semences biologiques en 2021 – © SEMAE / Sébastien Champion

Quelle est la situation en termes de disponibilité
des semences bio ?

Il faut savoir qu’aujourd’hui, l’offre en semences bio se décline en fonction des espèces et leur statut réglementaire. En effet, le règlement AB impose qu’il n’y ait plus de dérogations au 31/12/2036. À cette date, nous devrons être en mesure de fournir des semences bio pour l’ensemble des espèces végétales cultivées en AB.

Le travail mené par les professionnels au sein de l’interprofession a donc été de préparer les passages d’un certain nombre d’espèces d’un statut de « Dérogation Possible » (DP) au statut « Hors Dérogation » (HD). Cette anticipation a permis d’opérer sereinement les changements de statut en HD, comme dans le cas du blé tendre.

Nous observons une phase d’accélération vers l’objectif de 2036. De plus en plus d’espèces passent en HD avec une forte diminution des demandes de dérogation. Cela laisse à penser que la promesse de l’approvisionnement en semences bio est tenue. D’ailleurs, plus de la moitié des établissements semenciers français font de la semence ou du plant bio aujourd’hui (135 entreprises de production en 2021).

Et il y a une volonté très forte de la filière française de devenir leader, comme nous le sommes déjà en conventionnel. Nous sommes sur la bonne voie, puisque les derniers chiffres placent la France devant le premier producteur de semences bio européen, l’Italie. Notre nouveau challenge sera de le rester !

Nombre de variétés
Potagères et florales 171
Céréales à paille 160
Pommes de terre 119
Maïs et sorgho 118
Fourragères et gazon 76
Plantes oléagineuses 63
Protéagineux 27
Betteraves et chicorée industrielle 12
Lins et chanvre 5

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Photo haut de page : © SEMAE / Paul Dutronc