L'interprofession des semences et plants
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La création variétale au service de la ferme en 2030

06 février 2023

Le 2 février 2023, SEMAE et l’AGPB ont réuni plus de 100 participants à l’occasion de la réunion de la filière des semences céréales à paille & protéagineux sous une nouvelle formule, plus collaborative, à la fois à la Cité internationale universitaire de Paris et en distanciel et à une nouvelle période de l’année. Le thème général de cette rencontre filière était : “La création variétale  au service de la ferme en 2030”.

Thierry Momont, président de la section Céréales à paille et protéagnieux de SEMAE a ouvert cette rencontre avec optimisme : “J’espère qu’il y aura de plus en plus de synergie et de volonté de travailler ensemble pour apporter aux agriculteurs français des variétés qui répondent à leurs attentes et bien sûr aux attentes sociétales. L’investissement des céréaliers dans la recherche est un partenariat gagnant/gagnant pas toujours aisé à expliquer dans un contexte de fortes évolutions réglementaires et de changements climatiques qui impactent les potentiels de production. Notre volonté est donc bien de créer un nouvel évènement qui devienne un rendez-vous incontournable de la filière céréales à paille dans la diversité de ses espèces et de ses métiers.  Les 7,5 millions d’hectares de céréales semées en France le méritent bien ! ».

Changement climatique : quels outils dans nos fermes ?

Pour introduire ce thème qui touche tous les agriculteurs, la parole a été donnée à l’un d’entre eux, Denis Jamet , exploitant agricole spécialisé en grandes cultures dans la Champagne Berrichonne, à Soye-en-Septaine, dans le Cher et administrateur de l’AGPB : “Les aléas climatiques m’ont obligé hélas à réduire mon assolement”, mais également, par video interposée, à Nadège Petit, agricultrice dans le sud de l’Eure qui se demande comment elle va faire face aux bioagresseurs avec des solutions qui diminuent d’années en années.

Jean-Pierre Cohan qui dirige le département adaptation des cultures aux contextes agroclimatiques chez Arvalis – Institut du végétal pense que la génétique est un levier à combiner avec d’autres en tenant compte des parcelles, de l’exploitation agricole, de l’aspect territorial et des filières.

Marin Desprez, directeur de la stratégie de Florimond Desprez, a conscience que les semenciers sont très attendus dans ce contexte de dérèglement climatique, de diminution des engrais, de réduction de l’usage des produits phytosanitaires : “la génétique a permis et permettra le maintien des rendements. C’est un levier qui a fait ses preuves et qui a encore beaucoup de potentiel, notamment pour maintenir les rendements, néanmoins il n’y a pas de variété miracle” déclare-t-il.

Les nouvelles technologies ou NBT ont été largement abordées, mais, comme l’a souligné Marin Desprez : “il faut rester humble sur les attentes que l’on peut avoir sur ces technologies”. Un autre aspect est celui du temps de la recherche qui est long, entre 7 et 10 ans, pour créer une nouvelle variété et qui met à mal le métier de sélectionneur qui est une constante course de vitesse face aux bioagresseurs.

Agroécologie et création variétale

Comment réduire son impact environnemental notamment par le choix de ses variétés et que peut-on demander aux agriculteurs en matière d’agriculture durable jusqu’en 2030 ? Un vaste débat qui a suscité des échanges passionnés et passionnants.

Le seul moyen de contrecarrer le temps long de la sélection est l’anticipation. La recherche anticipe depuis longtemps afin de créér des variétés résistantes aux maladies et afin de mieux valoriser les intrants. Mais, comme l’a fait remarqué Laurent Guerreiro, président du directoire du groupe RAGT :  « Le financement de la création variétale est crucial d’autant plus que la durée de vie des variétés diminue : 3 ans alors qu’il en faut 7 à 10 ans pour la créer. La difficulté de notre métier, est qu’à la fin, il n’y a qu’un grain de blé ou un pois qui ressemble au grain de l’année d’avant. La technologie est à l’intérieur. On apporte un vrai progrès qui ne se voit pas à l’œil nu ».

Yves Madre, agronome, économiste, conseiller du Commissaire européen à l’agriculture et également Président du groupe de réflexion Farm Europe estime que la législation actuelle n’est plus adaptée à l’évolution de la science.

Christophe Boizard, agriculteur à Hautvillers-Ouville, dans la Somme renouvelle, tous les ans, de 20% ses variétés pour profiter du progrès génétique. Economiquement, pour lui, c’est une baisse de consommation de produits phytosanitaires. Mais c’est difficile à faire valoir auprès de la société. C’est pourquoi il communique quotidiennement sur les réseaux sociaux, afin de défendre l’agriculture, car il estime qu’en tant qu’agriculteur il est le mieux placer pour expliquer ses contraintes. Il est convaincu que : “Pour réduire les impacts environnementaux, la génétique ne fera pas tout, mais sans la génétique on ne fera rien”.

Laurent Guerreiro, est persuade que notre filière a la capacité à se réinventer et  a conclu cette table ronde de façon positive : “le green deal va nous forcer à bouger. Il faut le regarder de façon positive, car cela va nous pousser au changement et à la modification de nos pratiques pour s’adapter aux changements de demain”.

Quelles innovations pour nos fermes en 2030 ?

François Rollin, directeur du marketing stratégique chez Limagrain a ouvert cette table ronde en se posant trois questions face aux bouleversements structurel et conjucturel induits par la guerre en Ukraine. Que produit-on en France ? La réduction de la production est-elle durable ? Et, enfin, comment produit-on ? Car le nombre de solutions devient complexe pour lutter contre les bio-agresseurs et les stress environnementaux. « Moins on a de solutions disponibles, plus l’agronomie revient au centre. La sélection variétale ne peut être le seul levier pour une agriculture performante, rémunératrice et durable » affirme-t-il. Car, il est indispensable de créer de la richesse pour les agriculteurs.
La souveraineté alimentaire va devenir un enjeu central et pour y répondre les agriculteurs vont devoir avoir le sens de l’audace et de l’innovation.

Un financement sous la forme d’un partenariat public/privé doit être au service du système de demain, selon Christian Huyghe, directeur scientifique agriculture à l’INRAe, pour faire face aux grands défis du biocontrôle et des biostimulants. Il se demande : “Quel niveau de complexité du vivant, on accepte ?et assure : « On va inventer l’agronomie de demain. En 2030, on vendra une plante avec sa communauté microbienne”.

Stéphane Jezequel, directeur scientifique Arvalis -Institut du végétal, s’intéresse à l’agriculteur de 2030 qui aura la ferme qui lui ressemble grâce à une réflexion stratégique sur son système de production plus agroécologique, en trouvant les meilleures combinaisons par un travail commun entre les agriculteurs, les filières et les territoires.

Les céréales à paille : 70 % des surfaces cultivées

Eric Thirouin, président de l’Association Générale des Producteurs de blé et autres céréales (AGPB), a conclu cette matinée riche en échanges en encourageant les agriculteurs et les sélectionneurs, tous passionnés à investir ensemble dans les défis de demain, même si cela ne sera pas simple !

Il a rappelé que les céréales à paille représentent 70 % des surfaces cultivées : un contribution essentielle à l’agriculture française qui appelle toute la recherche et l’investissement nécessaires. Pour répondre aux enjeux climatiques et alimentaires, le monde agricole doit se réapproprier la réflexion sur les NBT trop souvent confisquée par un débat sociétal contradictoire qui se judiciarise et qui fragilise le développement de solutions concrètes et déterminantes.

Pour le Président de l’AGPB, la stratégie “Farm to fork” issue du “Green Deal” Européen doit être repensée avec des objectifs réalistes et réalisables : « Nous sommes engagés dans la transition mais nous devons construire des réponses sans hypothéquer notre capacité de production ». A ce titre, la recherche et l’innovation variétale seront essentielles. Autre sujet primordial : la décarbonation pour les dix années à venir. « Prenons l’’exemple du blé dur, des pâtes et du taux de protéines. Que souhaitons-nous ? C’est dans échanges tels qu’aujourd’hui que nous trouverons ensemble des réponses adaptées. C’est aussi ce que que défendons  avec le Contrat de solutions :  pas d’interdiction sans solutions ! »

Eric Thirouin plaide pour la mobilisation de financements massifs pour aller plus vite dans le développement d’alternatives réellement efficientes. C’est pour cette raison qu’a été décidé l’augmentation de la CRIV (Contribution, Recherche et Innovation variétale). Mais cela ne sera pas suffisant : pour aller plus loin, la contribution des producteurs doit être complétée par celle des filières… et même au-delà.

A la planification écologique proposée par l’Etat, je dis Banco, ça me plaît ça la notion de temps est intégrée. C’est une chance si nous travaillons tous ensemble car cela nécessite du temps mais également un investissement de tous, même de l’Etat. La transition ne sera possible que si la dynamique d’investissement est collective.

Vous pouvez visionner les cinq vidéos du colloque sur le lien vidéo suivant : La création variétale au service de la ferme 2030

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À propos de SEMAE

SEMAE, l’interprofession des semences et plants, représente l’ensemble des acteurs de la filière soit 51 fédérations et associations professionnelles. Elle les accompagne afin de leur permettre de répondre aux enjeux alimentaires, climatiques, économiques et sociétaux.

Au sein de SEMAE, la Direction de la qualité et du contrôle officiel des semences et plants est chargée de l’exécution des missions de service public et a la charge de faire appliquer les règlements techniques du ministère de l’Agriculture concernant la production, le contrôle et la certification des semences et des plants.

La filière semences et plants française est une filière d’excellence et compétitive avec un chiffre d’affaires qui s’élève à 3.5 Md€, la France est le 1er producteur européen (402.760 ha) et le 1er exportateur mondial (1,9 Md€). Elle génère 17.000 emplois directs.

Contacts :

Julien CONSTANT
Secrétaire général Section Céréales à paille et protéagineux
01 42 33 78 01
julien.constant@semae.fr

Rosine DEPOIX
Chargée de relations presse
01 42 33 88 29
rosine.depoix@semae.fr