L'interprofession des semences et plants
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« Les cultures intermédiaires sont un levier de l’agro-écologie »

Janvier 2019

Eric Justes
Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad)

Quelles sont les plantes qui piègent les nitrates ?

Jusqu’à présent, les espèces légumineuses utilisées comme cultures intermédiaires en période d’interculture étaient désignées comme « pièges à nitrates » (CIPAN (1)). Aujourd’hui, elles sont dénommées CIMS (2), car ces couverts végétaux offrent des services multiples, notamment lorsqu’ils sont associés à d’autres espèces (graminées, crucifères, composées, etc.) et sont utilisés comme couverture des sols en hiver. Ces mélanges piègent les nitrates et permettent aussi d’améliorer la fertilité des sols.

Quel en est le principe ?

Selon les conditions de sol et de climat, les légumineuses ont la particularité de se nourrir de deux façons : soit en fixant l’azote contenu dans l’air, soit en absorbant les nitrates présents et produits par la minéralisation du sol. Les CIMS composées de légumineuses sont de bons engrais verts, car elles restituent à la culture suivante l’azote minéral contenu dans leurs tissus. Si l’on combine des légumineuses avec d’autres types espèces, on maximise l’aspect multi-services des CIMS, en activant simultanément la fonction « piège à nitrates » et la fonction « engrais vert ».
C’est particulièrement efficace quand on sème un mélange de légumineuses (vesce, trèfle, féverole…) et de crucifères (radis, moutarde, navette, colza…).

Ces mélanges de différentes plantes présentent-ils d’autres atouts pour les agriculteurs ?

Une fois enfouie, leur matière organique contribue à l’amélioration de la fertilité des sols et leur permet de stocker une quantité importante de carbone. De plus, leurs effets de biocontrôle sur les ravageurs des cultures sont très intéressants ; c’est notamment vrai pour les crucifères. Elles sont aussi un bon auxiliaire dans la gestion des mauvaises herbes, en empêchant la germination, voire le développement de certaines d’entre elles. Enfin, dans le secteur de l’agriculture biologique, elles peuvent contribuer à la biodisponibilité du phosphore en absorbant puis en restituant sous forme assimilable ce dernier pour les cultures suivantes. A une époque où l’on prône l’agro-écologie, ces CIMS sont un levier très utile.

Y a-t-il une obligation d’y recourir ?

Dans les « zones vulnérables aux nitrates », soit 80 % des terres arables de grandes cultures en France, ces CIMS, connues sous le vocable CIPAN, sont obligatoires au minimum trois mois par an en interculture longue, sauf dérogation… et elles sont nombreuses ! En réalité, la « directive nitrates (3) » permet à chaque région de décliner son plan contre les pollutions nitriques et la fertilisation azotée excessive. A ce jour, le message n’est pas passé et ces cultures intermédiaires revêtent une connotation contraignante.

Sont-elles largement utilisées ?

Hélas, les agriculteurs n’y portent pas assez d’intérêt, car elles ne sont pas monétisées ! Elles ne rapportent rien ou peu à court terme… Leur rôle multi-services est insuffisamment connu et pris en compte. Il faut raisonner autrement et à une autre échelle temporelle pour apprécier à sa juste valeur ce que peuvent apporter les CIMS. Si elles sont bien choisies, elles peuvent contribuer à bien d’autres fonctions, à commencer par celle de limiter les intrants de synthèse, notamment les pesticides !

Une qualité de semences garantie

Grâce à un travail de sélection, la filière semences et plants du Gnis propose des variétés d’intercultures inscrites au COS (Catalogue officiel spécifique), et dont les caractéristiques optimisent les bienfaits recherchés.

  • La diversité des mélanges d’espèces permet de répondre à la diversité des attentes et des objectifs des utilisateurs.
  • La certification garantit la qualité requise pour une bonne efficacité de ces intercultures : par exemple, les semences utilisées pour limiter la prolifération d’adventices ne doivent pas contenir de graines indésirables.

 

(1) Culture intermédiaire piège à nitrate.
(2) Culture intermédiaire multi-services.
(3) Directive européenne de 1991, visant à protéger les eaux contre la pollution par les nitrates d’origine agricole